Poussée à son paroxysme, la société de consommation nous autorise à acheter bon nombre de produits en tout genre. Quelque soit l’endroit, et ce même si votre compte est débiteur, vous pouvez payer avec votre Visa, votre Eurocard Mastercard ou encore votre American Express, que vous soyez à Manhattan ou à Shibuya. Magnifique invention de l’homme que fut la création de la monnaie par les premiers peuples grecs, n’est-ce pas ? Désormais les hommes allaient être divisés en deux catégories : les personnes possédant de l’argent et celles qui n’en ont pas. Et depuis, les multiples conflits mondiaux et nationaux ont une part de leur origine dans cette quête de possession de tout ce qui peut être assimilé à de la richesse : billets, pièces, or, argent, diamants, saphirs, rubis, émeraudes, platine et tant d’autres termes qui font scintiller nos yeux rien qu’à la vue de ces mots. L’avidité de la nature humaine pousse tout individu à s’enrichir, à dépenser, à acheter, à consommer, encore et toujours plus. Ce vice qui a motivé tant de vengeances, de trahisons et de complots à travers les âges est arrivé jusqu’à nous, à un niveau encore jamais atteint.
C’est ainsi que l’on s’étale une dizaine de produits de beauté sur la peau chaque matin et que l’on consomme des cerises chiliennes en plein mois de décembre, du vin d’Afrique du Sud et des pamplemousses de Floride. L’argent nous a permis une chose impensable il y a encore quelques décennies : avoir la Terre entière présente à nos pieds, chez nous, à un prix considérablement réduit. Oui, le monde est à nos pieds. Mais il faudrait plutôt dire : le monde est aux pieds de l’Occident, terre de richesse. Laissons les pauvres du Tiers-Monde baver devant l’euro, le dollar et le yen. Mais n’oublions pas non plus que l’on achète aussi des services avec l’argent : garde du corps, majordome, femme de ménage, jardinier, précepteur et même pourquoi pas son coup du soir. C’est ainsi qu’on se rend sans conviction dans une boîte quelconque sans aucune motivation, à moitié déprimé. On discute avec deux ou trois personnes, on commence à en avoir vraiment marre que ces pauvres mecs nous racontent leur vie et puis on se retrouve à boire un dernier verre chez un homme qui nous emmerde plus qu’il ne nous intéresse. Et là, il faut profiter, tu as une envie énorme alors consommons-le comme si l’on achetait la dernière paire de chaussures à la mode. Utilise-le comme de la marchandise puisqu’il est là. Eh oui, le monde gay c’est aussi ça. A défaut de trouver le Prince Charmant, tu as réussi à trouver l’espace d’un instant, l’élu de tes fesses. Pathétique.
Dans ce monde où tout est devenu relation d’achat, de transaction, d’échange et de vente, l’être humain aurait-il été pris à son propre jeu et serait-il devenu lui aussi une simple marchandise comme une autre ? Un corps que l’on achète et dont on se débarrasse aussi rapidement que possible une fois qu’il a été consommé. Le « mari jetable » est-il un nouveau concept de produits tendance telles les innovantes lingettes dépoussiérantes que l’on jette sitôt après les avoir utilisées ? Cependant, même si consommer permet d’acquérir un confort matériel et de remplir son lit chaque soir en toute évidence, il est assez rare qu’elle arrive à acheter quelque chose d’unique et de magique : le coup de foudre et l’amour véritable qui en découle.